Paris, Saint-Etienne, Lyon, Grenoble, Rennes, Toulouse… Le point sur la mobilisation des étudiants contre la guerre à Gaza

samedi 4 mai 2024.
 

La contestation universitaire contre la guerre menée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza prend de l’ampleur, sur fond de polémiques et d’interventions policières. A Paris, où les forces de l’ordre ont mis fin à plusieurs tentatives de blocus ces dernières heures, mais aussi à Saint-Etienne, à Grenoble ou à Toulouse, les étudiants se mobilisent, pas toujours en nombre, pour dénoncer l’opération israélienne, qualifiée de « génocide ».

2 mai Journée mouvementée dans les universités françaises, alors qu’un mouvement grandissant d’étudiants réclame un cessez-le-feu à Gaza.

Après plusieurs heures de débats parfois tendus puis d’occupation des locaux, la direction de Sciences-Po Paris a annoncé ce jeudi 2 mai dans la soirée la fermeture de ses principaux locaux à dans la capitale pour la journée de vendredi. « Suite au vote de l’occupation des étudiants, les bâtiments du 25, 27, 30, rue Saint-Guillaume et du 56, rue des Saints-Pères, resteront fermés demain, vendredi 3 mai. Nous invitons à rester en télétravail », indique un message aux salariés, envoyé jeudi soir par la direction des Ressources humaines de Sciences Po.

En début de journée, la ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, avait appelé les présidents d’universités à agir contre ces mobilisations étudiantes. « Je vous demande d’utiliser l’étendue la plus complète des pouvoirs que vous confère le Code de l’éducation », a-t-elle réclamé, en dépit des interventions policières ayant déjà eu lieu dans plusieurs établissements. « Les présidentes et les présidents sont responsables du maintien de l’ordre dans l’enceinte universitaire. Et la police ne peut y entrer que sur réquisition de l’autorité universitaire », soulignait Sylvie Retailleau.

« Garantir » la « pluralité des expressions »

L’ancienne présidente de l’université Paris-Sud (devenue depuis Paris-Saclay) a rappelé aux directions qu’elles peuvent aussi prononcer une « interdiction temporaire d’accès de l’établissement » à un étudiant qui en menacerait un autre. Et leur a demandé en outre de « garantir » la « pluralité des expressions » au sein des universités et de « renforcer [leurs] dispositifs pour permettre à tous les débats de se tenir dans [les] établissements, dans le respect de la loi, naturellement, mais aussi des personnes et des idées ».

Par ailleurs, alors que des étudiants mobilisés remettent en question des partenariats entre leurs universités et des établissements israéliens, la ministre a affirmé qu’il est « hors de question que les universités prennent une position institutionnelle en faveur de telle ou telle revendication dans le conflit en cours au Proche-Orient ».

Premier syndicat dans les facs françaises, l’Union étudiante avait appelé samedi dernier les étudiants « partout en France […] à se soulever contre la répression et pour la paix à Gaza ». Un débat interne sur la situation à Gaza s’est tenu ce jeudi matin à Sciences-Po Paris, où la contestation a émergé la semaine dernière avant d’être visée par une intervention des CRS. Au terme de cet échange, concession faite par la direction aux étudiants protestataires qui avaient effectué une nouvelle tentative de blocage le 26 avril, l’administrateur provisoire de l’établissement, Jean Bassères, a évoqué « un débat dur, avec des prises de position assez claires, beaucoup d’émotion ». « J’ai refusé très clairement la création d’un groupe de travail proposé par certains étudiants pour investiguer nos relations avec des universités et des entreprises israéliennes », a-t-il notamment annoncé. Il a aussi regretté la décision de la présidente de l’Île-de-France, Valérie Pécresse, de couper les financements régionaux à l’établissement, espérant que celle-ci pourrait encore être « débattue ».

Des grèves de la faim

En réaction à la prise de parole de Jean Basseres, des étudiants ont décidé d’investir le hall de leur bâtiment historique et d’y faire un sit-in dans l’après-midi. Une assemblée générale s’est tenue en fin d’après-midi pour que les manifestants déterminent leurs futures actions. Selon les informations de Libération, au moins trois étudiants ont entamé une grève de la faim jusqu’à ce que l’administration décide « d’enquêter sur ses partenariats avec les universités israéliennes violant les droits humains » raconte une étudiante proche des grévistes. Ils font des émules.

Libé a également pu rentrer en contact avec Lina (prénom modifié), étudiante de 19 ans sur le campus délocalisé de Reims de Sciences Po Paris. Elle affirme vouloir entamer elle aussi une grève de la faim « jusqu’à ce que Sciences Po s’engage à la création d’un groupe de travail et la publication d’un rapport sur les partenariats universitaires et économiques vis-à-vis des violations du droit international et des droits de l’Homme en Palestine ». Elle espère être suivie par quelques camarades dans sa démarche.

31 avril A Paris, une AG conséquente et l’espoir d’une convergence

Article de Samuel Ravier-Regnat, AFP, publié par Libération

Une assemblée générale à l’université de Tolbiac, dans le XIIIe arrondissement de Paris, a réuni ce mardi près de 500 étudiants, . La direction de l’université a annoncé que le site avait été fermé en début d’après-midi « pour des raisons de sécurité ».

A Franceinfo, le Comité Palestine de la fac affirmait vers 15h30 que la direction « a enfermé les étudiants dans le campus » et que « plus d’un millier de personnes sont confinées à l’intérieur ». Sur les réseaux sociaux, des vidéos donnent à voir des étudiants qui patientent dans la fosse à l’entrée de l’université et scandent « Pour l’honneur de la Palestine et tous ceux qu’on assassine », sur l’air du « On est là » popularisé par les gilets jaunes.

Les événements de Tolbiac marquent un nouvel épisode de la mobilisation des étudiants parisiens, qui s’étend depuis une semaine. A Sciences Po, dans la nuit de mercredi à jeudi, il avait fallu l’intervention des CRS pour expulser la soixantaine de manifestants qui occupaient les lieux depuis quelques heures. Deux jours plus tard, à l’issue d’une nouvelle tentative de blocage, la direction avait accédé à plusieurs revendications des protestataires : la tenue d’une réunion publique sur la guerre dans l’enclave palestinienne et la « suspension des saisines de la section disciplinaires » engagées contre des étudiants ayant manifesté leur soutien à la Palestine. Puis, lundi, ce sont les étudiants mobilisés à la Sorbonne qui à leur tour ont été délogés par la police.

A Tolbiac, les participants visent une convergence des mouvements de protestation franciliens. Ce mardi, ils ont voté en faveur de l’organisation d’une assemblée générale interfacs, qu’ils souhaitent organiser jeudi soir. « La mobilisation s’est vraiment renforcée dans toutes les universités de France. Des AG ont eu lieu dans presque toutes les facs de la région parisienne », se réjouit auprès de Libération Mathis Aversenq, militant NPA Jeunes Révolutionnaires. « Il y a beaucoup de nouveaux venus, qui sont inspirés par ce qui se passe aux Etats-Unis », où les campus se mobilisent aussi en soutien à la cause palestinienne, ajoute-t-il.

Intervention policière à Saint-Etienne

A Saint-Etienne, ce mardi, la police a délogé des étudiants qui bloquaient depuis la veille le département des études politiques de l’Université Jean-Monnet. Les manifestants, une trentaine environ, n’ont pas opposé de résistance, ni commis de dégradation, selon les forces de l’ordre. Ils ont obtenu qu’une délégation soit reçue pour discuter avec le président de l’université dans le but d’organiser un débat sur la question palestinienne, ont expliqué leurs représentants. Lundi, les protestataires avaient reçu le soutien de la députée La France insoumise (LFI) de la Loire Andrée Taurinya, dont le parti souhaite un élargissement de la contestation étudiante.

Les IEP mobilisés

Dans la continuité des événements survenus à Sciences Po Paris, la semaine dernière, plusieurs Instituts d’Etudes politiques (IEP) ont été le théâtre ces dernières heures de manifestations ou de blocages. A Rennes, un « blocage filtrant » a été mis en place ce mardi dans la matinée par une cinquantaine d’étudiants. « L’Assemblée générale a investi les locaux de Sciences Po Rennes pour une durée indéterminée, en solidarité avec le peuple palestinien qui subit depuis octobre d’insupportables massacres, jugés par la Cour internationale de justice comme présentant un « risque plausible de génocide » en janvier dernier », ont expliqué les étudiants dans un communiqué.

Deux entrées de Sciences Po Strasbourg ont également été bloquées par les étudiants, tandis que dans la cour de l’IEP de Lyon quelque 150 personnes ont manifesté en « solidarité » avec la bande de Gaza, aux cris de « Palestine vivra, Palestine vaincra ». A Toulouse, enfin, la direction a décidé de fermer l’établissement de manière préventive, par « obligation de sécurité », à partir de 16h30 ce mardi. Un rassemblement devait avoir lieu à 17 heures dans la cour de l’Institut.

A Grenoble, un sit-in contre un partenariat avec une université israélienne

À Grenoble, une centaine d’étudiants ont participé à un « sit-in » sur les voies du tramway pendant une heure pour demander, notamment, la fin du partenariat noué en 2023 entre la faculté de Grenoble et l’Université du Néguev Ben-Gourion. Les étudiants ont scandé des slogans accusant l’Etat et les universités d’être « silencieux » et « complices » du « génocide en cours à Gaza ». « Nous appelons à poursuivre le mouvement après ce qu’il s’est passé à Sciences Po Paris », a expliqué Robinson Rossi, président de l’Union étudiante de Grenoble.


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